Soudan du Sud, destination inattendue des déportés américains : ce qu'il faut savoir sur ce pays en crise
Les États-Unis sont sommés de s'expliquer après avoir apparemment déporté des migrants originaires du Vietnam, de Cuba et d'autres pays vers le Soudan du Sud, un pays en proie au chaos et au bord d'une nouvelle guerre civile. Un juge américain a ordonné à l'administration Trump de comparaître lors d'une audience d'urgence mercredi pour répondre aux questions. L'administration a affirmé avoir expulsé huit immigrants condamnés pour crimes violents aux États-Unis, mais a refusé de révéler leur destination finale.
Si le Soudan du Sud est confirmé comme destination, cela signifierait que des personnes sans aucun lien avec ce pays sont envoyées à des milliers de kilomètres de leur lieu d'origine. Le Vietnam ne dispose d'ailleurs qu'une seule ambassade en Afrique, située en Tanzanie à plus de 800 miles du Soudan du Sud. Le porte-parole de la police sud-soudanaise, le major-général James Monday Enoka, a déclaré à l'AP qu'aucun migrant n'était encore arrivé et que dans le cas contraire, ils seraient interrogés puis « renvoyés vers leur pays d'origine » s'ils ne sont pas Sud-Soudanais.
Certains habitants de la capitale Juba craignent que leur pays ne devienne une décharge pour criminels étrangers. « Ces déportés incluent des criminels qui vont augmenter l'insécurité ici », s'inquiète Martin Mawut Ochalla, 28 ans. Ce n'est pas la première fois que l'administration Trump fait pression sur le Soudan du Sud concernant les déportations. Récemment, Washington a brusquement révoqué les visas de tous les Sud-Soudanais, accusant leur gouvernement de ne pas coopérer sur les retours.
Le Soudan du Sud, indépendant depuis 2011, peine à fournir des services publics de base après des années de guerre civile qui ont fait des centaines de milliers de morts. Un accord de paix fragile signé en 2018 n'est toujours pas pleinement appliqué, au grand dam des bailleurs internationaux. Le pays n'a toujours pas organisé d'élections présidentielles et le président Salva Kiir reste au pouvoir, tandis que son rival Riek Machar nourrit toujours des ambitions présidentielles.
Les tensions entre les deux hommes, aggravées par des divisions ethniques, ont failli replonger le pays dans la guerre plus tôt cette année après des arrestations et des attaques armées. Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a mis en garde contre un scénario similaire aux guerres civiles de 2013 et 2016 qui ont fait 400 000 morts. Plusieurs pays occidentaux ont fermé leurs ambassades ou réduit leur personnel diplomatique.
La pression américaine contraste avec le soutien passé aux rebelles sud-soudanais. Aujourd'hui, les 11 millions d'habitants subissent des coupes drastiques de l'aide américaine, tandis que les chocs climatiques et la corruption paralysent le pays. Avec un système de santé et d'éducation parmi plus faibles au monde, et des fonctionnaires souvent impayés, la capacité du Soudan du Sud à gérer des déportés massifs reste très incertaine.