L'éclatement de la bulle des sciences informatiques : la fin d'un rêve ?
Pendant des années, les sciences informatiques étaient considérées comme la voie royale vers une carrière lucrative. Cependant, les récentes statistiques révèlent un déclin surprenant des inscriptions dans cette filière. Entre 2005 et 2023, le nombre d'étudiants en informatique aux États-Unis a quadruplé, mais cette croissance s'est brutalement ralentie en 2024, avec une hausse de seulement 0,2%. Des universités prestigieuses comme Stanford et Princeton observent même une baisse significative. La raison principale ? Un marché du travail de plus en plus hostile pour les jeunes diplômés.
Les licenciements massifs et les gels d'embauche dans le secteur technologique ont semé le doute. L'intelligence artificielle, particulièrement efficace pour écrire du code, menace désormais les emplois juniors. Une étude de Pew révèle que les Américains considèrent les ingénieurs logiciels comme les plus vulnérables face à l'IA générative. Chris Gropp, doctorant en informatique, incarne cette crise : malgré ses compétences en machine learning, il peine à trouver un emploi après huit mois de recherche.
Les chiffres sont alarmants. L'emploi des 22-27 ans en informatique et mathématiques a chuté de 8% en trois ans, alors qu'il progressait légèrement dans d'autres secteurs. Même les diplômés des meilleures universités doivent redoubler d'efforts pour décrocher un poste. Les géants technologiques comme Alphabet et Microsoft admettent que l'IA produit déjà plus de 25% de leur code, réduisant leur besoin en développeurs juniors.
Certains experts tempèrent cependant ce constat. Zack Mabel, de l'Université de Georgetown, rappelle que le secteur technologique a toujours connu des cycles d'expansion et de récession. David Deming, professeur à Harvard, souligne que les entreprises ont intérêt à attribuer leurs licenciements à l'IA plutôt qu'à leurs propres décisions. L'histoire montre d'ailleurs que les inscriptions en informatique fluctuent avec le marché du travail, et pourraient rebondir à l'avenir.
Face à cette incertitude, les économistes conseillent aux étudiants de privilégier des compétences durables et transférables. Étonnamment, les sciences humaines pourraient offrir une meilleure sécurité à long terme que les compétences techniques spécialisées. Comme le résume Deming : "Il est risqué d'apprendre un métier précis, car l'avenir est imprévisible. Mieux vaut acquérir des compétences qui résisteront aux changements pendant 45 ans de carrière."