L'économie russe en surchauffe après l'invasion de l'Ukraine – L'essoufflement se profile
L'économie russe, qui avait connu un boom après l'invasion de l'Ukraine en 2022, montre désormais des signes d'essoufflement. Malgré des années de résilience face aux sanctions occidentales, le pays se trouve au bord de la récession en raison des dépenses militaires excessives du Kremlin, qui aggravent les pénuries de main-d'œuvre et l'inflation.
Lors du Forum économique de Saint-Pétersbourg, le ministre russe de l'Économie, Maxim Reshetnikov, a averti que le pays était "au bord" d'une récession. Cette déclaration confirme les prévisions des économistes : le modèle de "keynésianisme militaire", basé sur des dépenses publiques massives dans la défense, atteint ses limites.
En 2022, les sanctions occidentales et le départ des entreprises étrangères avaient fait craindre un effondrement économique. Pourtant, la Russie a maintenu sa croissance grâce à des investissements records dans son complexe militaro-industriel, évalué à 167 milliards de dollars en 2023. Ces dépenses ont stimulé la production industrielle et augmenté les salaires dans les secteurs liés à la guerre.
Cependant, cette stratégie a un coût. Les dépenses militaires représentent désormais 6,3 % du PIB, soit près du double du budget de défense américain. Elina Ribakova, économiste au Peterson Institute, compare cette situation à un jeu de chaises musicales : tant que l'argent circule, la guerre reste populaire. Mais les limites structurelles de l'économie russe se font sentir.
La pénurie chronique de main-d'œuvre, aggravée par l'émigration et les pertes militaires, freine la productivité. En 2022, le nombre de travailleurs âgés de 16 à 35 ans a chuté de 1,33 million. Les salaires réels augmentent, mais pas la productivité, ce qui alimente l'inflation (près de 10 % en 2025) et menace de stagflation.
La Banque centrale russe a relevé les taux d'intérêt à 20 % pour juguler l'inflation, mais cette politique freine la croissance, estimée entre 1 et 2 % en 2025. Le président Vladimir Putin appelle à un équilibre entre lutte contre l'inflation et relance économique.
La dépendance aux exportations de pétrole et de gaz (20 % du PIB) rend l'économie vulnérable. La baisse des prix du pétrole début 2025 a contraint le Kremlin à réviser son déficit budgétaire. Toutefois, la flambée des prix due aux tensions au Moyen-Orient pourrait offrir un répit temporaire.
Alexander Kolyandr, du Center for European Policy Analysis, estime que sans gains de productivité, la croissance russe restera limitée. Le PIB par habitant, proche de celui du Mexique ou de la Turquie, reflète cette faiblesse structurelle.
Enfin, malgré une éventuelle détente diplomatique sous un éventuel retour de Donald Trump à la Maison Blanche, le retour des entreprises américaines en Russie reste incertain. Charles Kupchan, du Council on Foreign Relations, y voit un levier de négociation pour mettre fin à la guerre en Ukraine.