Raids de l'ICE : l'incertitude effraie les travailleurs et déroute les entreprises
Les raids de l'ICE (Immigration and Customs Enforcement) et leur imprévisibilité ont semé la peur parmi les travailleurs immigrés et plongé les entreprises dans la confusion. Alors que le président Donald Trump avait ordonné une pause dans ces opérations, un récent revirement des autorités a ravivé l'inquiétude. Cette situation perturbe des secteurs clés comme l'agriculture, l'élevage et l'hôtellerie, qui dépendent fortement de la main-d'œuvre immigrée.
La semaine dernière, les professionnels de ces secteurs avaient accueilli avec soulagement l'annonce d'une suspension temporaire des raids. Rebecca Shi, PDG de la Coalition américaine pour l'immigration des entreprises, évoquait alors « un sentiment de calme retrouvé ». Mais cette accalmie fut de courte durée. Mercredi, un haut responsable du Département de la Sécurité intérieure a réaffirmé la détermination du gouvernement à poursuivre les contrôles, créant une nouvelle vague d'incertitude.
Les conséquences sont tangibles sur le terrain. Dans les fermes laitières du Nouveau-Mexique, certaines exploitations ont perdu plus de la moitié de leur personnel. « On ne peut pas arrêter les vaches de produire du lait », souligne Beverly Idsinga, directrice des Producteurs laitiers de l'État. Même son de cloche dans les restaurants de Los Angeles, où des employés légalement présents sur le territoire évitent désormais de se rendre au travail par crainte des contrôles.
À Washington, les vergers de cerisiers font face à une pénurie de main-d'œuvre due aux rumeurs de raids - bien qu'aucune opération n'ait été signalée. « Nous n'avons vu aucun raid réel, seulement entendu des rumeurs », précise Jon Folden, gestionnaire d'exploitation. Pourtant, l'effet est le même : les travailleurs restent chez eux.
Cette situation place les entreprises dans une position difficile. Comme le note Patrick Murphy, ancien membre du Congrès et investisseur dans le bâtiment, « l'incertitude quant aux règles et à leur application rend très difficile la gestion d'une entreprise tournée vers l'avenir ». Un constat partagé par les économistes, qui soulignent le rôle clé des travailleurs immigrés dans la stabilité économique du pays.
Les données sont éloquentes : si les travailleurs nés à l'étranger représentent moins de 19% de la main-d'œuvre totale, ils occupent 24% des emplois dans la restauration et 38% dans l'agriculture. Une étude du Pew Research Center révèle que 75% des électeurs américains - dont 59% des partisans de Trump - reconnaissent que ces travailleurs occupent des emplois que les citoyens américains ne veulent pas faire.
Alors que l'économie américaine bénéficiait récemment d'un afflux d'immigrants permettant de contenir l'inflation sans tomber en récession, la politique actuelle de l'administration Trump crée des tensions croissantes entre objectifs politiques et réalités économiques. Comme le résume Douglas Holtz Eakin, ancien directeur du Congressional Budget Office, « la politique d'immigration et la politique économique ne sont pas du tout alignées ».