Le système de santé américain : une machine à profits délibérément conçue pour creuser les inégalités
Le système de santé américain, réputé pour ses coûts exorbitants et ses profondes inégalités, n'est pas dysfonctionnel par accident. Selon Zachary W. Schulz, historien de la santé publique à l'Université d'Auburn, il a été sciemment conçu pour servir les intérêts des entreprises et des politiciens, au détriment de la population.
Dans les années 1940, l'assurance maladie liée à l'emploi est née d'une astuce fiscale pendant le gel des salaires en temps de guerre, plutôt que d'une réelle préoccupation pour la santé des travailleurs. Cette décision a ancré l'accès aux soins dans le statut professionnel, une structure toujours dominante aujourd'hui.
Les programmes Medicare et Medicaid, créés en 1965, ont certes élargi l'accès aux soins, mais ont aussi renforcé les disparités existantes. Le Medicaid, en particulier, varie considérablement d'un État à l'autre, avec des critères d'éligibilité et une couverture inégaux, résultat des luttes des législateurs du Sud pour maintenir le contrôle sur la distribution des avantages, souvent selon des critères raciaux.
Les réformes ultérieures, comme l'Affordable Care Act de 2010, n'ont pas réussi à corriger ces inégalités structurelles. L'absence d'option publique et la décision de la Cour suprême en 2012 de rendre facultative l'expansion du Medicaid ont exacerbé les disparités, laissant des millions d'Américains sans couverture adéquate.
Aujourd'hui, le système continue de favoriser les intérêts des assureurs et des prestataires, transformant la complexité en profits et les barrières bureaucratiques en obstacles insurmontables pour les patients. Les communautés rurales et à faible revenu paient le prix fort, avec des hôpitaux qui ferment et des soins préventifs inaccessibles.
Pour Schulz, comprendre que ce système fonctionne exactement comme prévu est la première étape vers un changement significatif. Les exemples de l'Allemagne, de la France et du Canada montrent qu'un système universel, transparent et centré sur les patients est possible. Mais cela nécessitera de rompre avec des décennies de politiques qui privilégient le profit au détriment de la santé publique.