Comment le 'grand beau projet de loi' de Trump pourrait devenir un casse-tête pour les entreprises canadiennes et les investisseurs
Un vaste projet de fiscalité américain, qualifié de "grand et beau projet de loi" par l'ancien président Donald Trump, pourrait bouleverser des décennies de traitement fiscal favorable dont bénéficiaient les grandes entreprises et fonds de pension canadiens aux États-Unis. Adopté par la Chambre des représentants jeudi dernier, ce texte contient des dispositions visant à riposter contre les régimes fiscaux étrangers jugés "injustes". Selon des avocats fiscalistes, ces mesures pourraient remettre en cause les traités fiscaux existants et perturber les flux d'investissements transfrontaliers du Canada. Si la loi est promulguée dans sa forme actuelle par le Sénat américain, les fonds canadiens et les multinationales opérant aux États-Unis pourraient faire face à de nouvelles taxes ou à des hausses d'impôts dès janvier 2026. Le projet cible également les particuliers percevant des revenus de sources américaines. Bien qu'aucun pays ne soit explicitement nommé, le Canada pourrait être concerné par ces mesures de rétorsion, notamment en raison de sa taxe sur les services numériques appliquée aux grandes entreprises technologiques étrangères, explique Jack Mintz, expert à l'Institut C.D. Howe. Une autre disposition problématique pour le Canada serait la règle sur les profits insuffisamment taxés. Le pays ayant adhéré à l'impôt minimum mondial sur les sociétés de 15%, contrairement aux États-Unis, les implications seraient larges : des taxes sur les profits des succursales bancaires aux retenues à la source pour les fonds de pension et les fonds souverains. Les augmentations d'impôt proposées concerneraient cinq catégories de revenus, avec des majorations progressives pouvant atteindre 20 points de pourcentage au-dessus du taux statutaire pour les pays considérés comme discriminatoires. Certains républicains s'opposent au projet, craignant une aggravation de la dette américaine. Mais Max Reed, avocat fiscaliste chez Polaris Tax Counsel, estime qu'il sera adopté par le Sénat, car il touche principalement des contribuables non américains. Laura Gheorghiu du cabinet Gowling WLG tempère cependant ces craintes, rappelant que les menaces tarifaires de Trump s'étaient souvent atténuées dans leur mise en œuvre. Les fonds de pension et banques canadiennes se préparent discrètement à d'éventuels impacts, tout en espérant des marges de manœuvre. Jim Keohane, ancien PDG de HOOPP, souligne que des taxes supplémentaires rendraient les investissements aux États-Unis moins attractifs pour les fonds canadiens. John Graham de CPP Investments affirme néanmoins ne pas prévoir de changement majeur dans sa stratégie d'investissement, malgré l'augmentation à 47% des actifs placés aux États-Unis.