L'EPA assouplit les normes sur l'eau potable pour 4 PFAS : des milliers d'autres substances toxiques restent non réglementées
La semaine dernière, l'Agence américaine de protection de l'environnement (EPA) a annoncé son intention de réviser les limites de concentration pour quatre substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) dans l'eau potable, suscitant la colère des groupes environnementaux. Ces "produits chimiques éternels", liés à des cancers et à des dommages pour les systèmes immunitaire et endocrinien, avaient été réglementés en avril dernier par l'administration Biden.
Sur plus de 10 000 PFAS connus, seuls six avaient été ciblés. L'EPA de l'ère Trump conserve les limites pour deux substances (PFOA et PFOS) mais reporte leur application à 2031, tout en supprimant les restrictions pour les quatre autres. Un défenseur de l'environnement a qualifié cette décision de "victoire pour les entreprises chimiques".
Les PFAS, utilisés dans les vêtements outdoor, les ustensiles de cuisine et les emballages alimentaires, contaminent les eaux via les rejets industriels et les mousses anti-incendie. Leur persistance dans l'environnement leur vaut le surnom de "produits chimiques éternels". Les experts soulignent que même à faible dose, certains comme le PFOS et le PFOA augmentent les risques de cancer.
Les normes initiales de Biden imposaient 4 parties par billion pour PFOA/PFOS et 10 pour trois autres PFAS. Le sixième (PFBS) devait être surveillé via un "indice de danger". L'EPA justifie son revirement par des "incohérences procédurales" avec la loi sur l'eau potable, promettant de nouvelles règles au printemps 2025.
Les impacts varieront selon les régions. Les zones contaminées par PFOA/PFOS verront peu de changements, mais des États comme la Caroline du Nord (touchés par le GenX) pourraient subir une poursuite de la pollution. Les technologies de filtration actuelles éliminent mal certains PFAS comme le GenX, nécessitant des systèmes plus coûteux (osmose inverse).
Les scientifiques critiquent l'approche "molécule par molécule" de l'EPA. Erik Olson (NRDC) dénonce un "jeu de whac-a-mole" réglementaire : seuls les PFAS bien étudiés sont contrôlés, alors que leurs cousins méconnus pourraient être tout aussi toxiques. Ils plaident pour une régulation par classe chimique.
Un point inquiète particulièrement les experts : la mention d'un "cadre d'exemption" pour PFOA/PFOS, qui pourrait permettre aux services des eaux de contourner les normes sous prétexte de coûts. L'EPA assure que ces exemptions ne signifieront pas de non-respect des règles.
Le financement de la recherche sur les PFAS est aussi en jeu. Daniel Jones (Université d'État du Michigan) révèle que des subventions fédérales sur les mélanges de PFAS ont été coupées. Il prône l'application du "principe de précaution", courant en Europe mais rare aux États-Unis.
Juridiquement, ce revirement pourrait violer la loi sur l'eau potable, qui interdit tout recul dans la protection sanitaire et limite les délais de mise en conformité à cinq ans (contre sept ans ici). Pour Olson, la seule solution durable est l'élimination progressive de tous les PFAS.
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