Pollution de l'air : un danger silencieux pour les familles noires
Alors que je marchais avec mes enfants vers leur école dans le sud-est de Londres, enceinte de mon troisième enfant, j'ai commencé à remarquer des problèmes récurrents dans la santé de ma fille. Ma cadette de quatre ans, autrefois pleine d'énergie, tombait malade de plus en plus souvent. Un jour, pendant les cours d'éducation physique, l'école m'a appelée : ma fille était prostrée au bord du terrain de jeu, incapable de participer aux activités. Après un passage aux urgences de l'hôpital de Lewisham, on lui a diagnostiqué une pneumonie acquise en communauté - l'une des principales causes de mortalité chez les moins de cinq ans. Ce fut un déclic. Peu après, j'ai découvert le cas d'Ella Adoo-Kissi-Debrah, première personne au Royaume-Uni dont la mort a été officiellement attribuée à la pollution atmosphérique. Elle vivait près de chez nous. Les pièces du puzzle commençaient à s'assembler : notre exposition chronique à l'air pollué n'était pas qu'une gêne, mais un réel danger vital. À l'époque, je présidais le Maternity Voices Partnership de l'hôpital St Thomas, où je militais pour mieux faire entendre la voix des mères noires dans le système de santé. Mais nos discussions se concentraient surtout sur ce qui se passait à l'hôpital - préjugés, négligences et inégalités de traitement. Personne ne se demandait pourquoi tant de femmes noires arrivaient déjà en mauvaise santé, stressées ou avec des grossesses à risque. C'est ainsi qu'est née ma campagne. J'ai fondé Global Black Maternal Health, avant de réaliser que l'enjeu dépassait la santé maternelle noire. Il concernait aussi la santé infantile, l'éducation et l'environnement. D'où notre changement de nom pour Global Child and Maternal Health. Ce nouveau nom reflète mieux la globalité de notre action : de la grossesse à l'enfance, de la recherche aux politiques publiques, des données au soutien communautaire. Quand j'ai commencé ce travail en 2018-2019, les femmes noires au Royaume-Uni avaient cinq fois plus de risques de mourir pendant leur grossesse ou l'accouchement. Elles ont toujours deux fois plus de risques de vivre un mortinaissance. Or, on sait que l'exposition à un air très pollué double aussi les risques de mortinaissance, sans parler des dangers accrus d'accouchement prématuré, de faible poids de naissance, de pré-éclampsie et autres complications. Après avoir écouté d'autres mères noires et issues de minorités, mes recherches ont confirmé qu'au Royaume-Uni, les femmes noires ont trois fois plus de chances de vivre dans les zones les plus polluées, selon un rapport du bureau du maire de Londres. Ces chiffres ne tombent pas du ciel : ils reflètent des inégalités structurelles nourries par le racisme, la pauvreté et l'injustice en matière de logement. J'ai aussi lancé la campagne Black Child Clean Air, qui organise notamment une conférence annuelle au Parlement. Cet événement réunit décideurs politiques, membres de la communauté, militants pour la justice environnementale et représentants du gouvernement. Notre objectif ? Centrer le mouvement pour la justice environnementale sur une approche intersectionnelle, qui reconnaît comment race, santé et environnement s'entrelacent pour affecter disproportionnellement les enfants et familles noires. La campagne s'appuie sur notre rapport Black Child Clean Air, publié tous les trois ans et disponible sur notre site. Ce document explore les attitudes, expériences et comportements des femmes noires au Royaume-Uni enceintes ou avec des enfants de moins de cinq ans. Il met en lumière les défis quotidiens des familles vivant dans des environnements pollués et propose des recommandations fondées sur des preuves. Pour nous, il est crucial que des communautés comme la nôtre produisent leurs propres données et récits. Nous vivons selon le principe « rien sur nous sans nous ». Nous ne demandons pas à être incluses dans des conversations préétablies - nous créons les nôtres. Nous concevons et menons nos projets parce que la santé et la vie de nos bébés, de nos enfants et de nous-mêmes en tant que parents méritent notre propre voix, notre propre pouvoir et nos propres solutions. Notre conférence de juin a offert une plateforme où l'expérience vécue façonne les politiques, où le dialogue se transforme en action, et où les communautés peuvent exiger des changements systémiques. Elle a amplifié des voix trop souvent exclues et construit le pouvoir collectif nécessaire pour lutter pour un air pur équitable. Agnes Agyepong est mère de trois enfants, fondatrice et directrice de Global Child and Maternal Health. Elle a aussi lancé la campagne Black Child Clean Air, née d'une expérience profondément personnelle.