L'islamophobie d'État en France : un terreau fertile pour la violence
Le 27 juin, la mosquée El Hidaya à Roussillon, dans le sud de la France, a été vandalisée : vitres brisées, mobilier renversé et murs couverts de tracts racistes. Début juin, un Coran brûlé avait été déposé à l'entrée d'une mosquée de Villeurbanne, près de Lyon. Ces actes s'inscrivent dans une escalade inquiétante de l'islamophobie en France, allant jusqu'au meurtre. Le 31 mai, Hichem Miraoui, un Tunisien, a été abattu par son voisin français près de la Côte d'Azur ; un autre musulman a été blessé par balle. En avril, Aboubakar Cisse, un Malien, a été poignardé à mort dans une mosquée de La Grand-Combe. Les autorités françaises restent silencieuses face à cette flambée de violence, alors qu'un rapport révèle une augmentation de 72 % des actes islamophobes entre janvier et mars 2025 par rapport à 2024. Cette situation découle en grande partie des politiques et discours anti-musulmans de l'État français. En témoigne le récent rapport gouvernemental "Les Frères musulmans et l'islam politique en France", qui accuse des organisations musulmanes de menacer la cohésion sociale. Publié peu avant le meurtre de Miraoui, ce rapport fait suite à des perquisitions visant des membres du Collectif contre l'islamophobie en Europe (CCIE). L'islamophobie institutionnalisée L'obsession de l'État français pour ce qu'il nomme "séparatisme islamiste" semble alimenter la violence contre les musulmans. Cette rhétorique, longtemps portée par l'extrême droite, est désormais mainstream. En 2018, Emmanuel Macron a appelé à créer un "islam de France", euphémisme pour un contrôle des institutions musulmanes. Entre 2018 et 2020, 672 structures musulmanes ont été fermées. En novembre 2020, les autorités ont dissous le CCIF, avant de menacer 76 mosquées de fermeture. La loi "anti-séparatisme" de 2021 a renforcé ces mesures répressives. D'ici janvier 2022, plus de 24 000 organisations musulmanes avaient été inspectées, 700 fermées et 46 millions d'euros saisis. Le spectre des Frères musulmans Le rapport de mai 2025, comme d'autres initiatives officielles, vise à politiser l'identité musulmane et à délégitimer toute critique. Il assimile la lutte contre l'islamophobie à une stratégie des Frères musulmans pour discréditer l'État. Il reprend aussi la théorie du complot de l'"islamo-gauchisme", accusant la gauche de collusion avec les islamistes. Commandé par Gérald Darmanin, ce rapport s'inscrit dans une tradition coloniale de contrôle des populations musulmanes. En adoptant cette rhétorique islamophobe, le centre politique français cherche à contrer la montée de l'extrême droite. Mais cette stratégie électoraliste risque surtout d'accroître la stigmatisation et les violences contre les musulmans de France.