Accuser Airbnb masque la véritable cause du surtourisme : nous-mêmes
Les résidents des destinations touristiques d'Europe du Sud manifestent à nouveau contre l'afflux massif de visiteurs estivaux, comme l'année dernière. À Barcelone, ville de 1,7 million d'habitants ayant accueilli 15,5 millions de visiteurs en 2023, des pancartes proclament : "Le tourisme vole notre pain, notre toit et notre avenir". À Palma de Majorque, des protestataires ont arrosé les vacanciers avec des pistolets à eau, tandis qu'à Venise, des activistes ont déployé une banderole sur le pont du Rialto lors du mariage de Jeff Bezos, avec le message : "Pas de place pour Bezos !".
Cette colère est compréhensible, selon Hans-Christian Rößler du Frankfurter Allgemeine Zeitung. Des villes comme Lisbonne et Barcelone sont devenues inabordables, avec des loyers en flèche et des commerces locaux remplacés par des boutiques de souvenirs et des fast-foods. Airbnb est souvent désigné comme le principal responsable. Madrid a récemment ordonné le retrait de 66 000 locations illégales de la plateforme, une décision confirmée par la justice espagnole. Barcelone a quant à elle décidé de ne pas renouveler 10 000 licences de locations saisonnières d'ici 2028.
Airbnb rejette ces accusations dans un rapport affirmant que le surtourisme est surtout "porté par les hôtels". En 2023, 75 % des nuitées à Barcelone se sont faites dans des hôtels, tandis que le nombre de locations a chuté de 50 % en trois ans. Juan Cierco d'El Periódico souligne que l'offre de logements répond avant tout à la demande, tout comme les croisières (en hausse de 50 % à Barcelone et Lisbonne entre 2022 et 2023) et les vols low-cost (Ryanair a transporté plus de 200 millions de passagers en un an).
Avec 94 millions de visiteurs en 2024, l'Espagne est le deuxième pays le plus visité au monde. Le tourisme représentant plus de 12 % de son PIB, le gouvernement doit trouver un équilibre entre régulation et croissance économique. Mais pour Chris Christou, animateur du podcast "The End of Tourism", la solution repose sur les voyageurs eux-mêmes : "Si vous aimez un endroit, laissez-le tranquille. N'y allez pas."