La Bank of America prédit un boom du 'reshoring' grâce aux droits de douane, mais les experts alertent sur un effet à double tranchant pour l'économie
Selon la Bank of America, les droits de douane pourraient stimuler un retour des productions avancées aux États-Unis, mais cette relocalisation pourrait aussi accentuer l'automatisation sans créer d'emplois. Greg McKenna, collaborateur chez Fortune, rapporte que les signes d'un ralentissement manufacturier américain se multiplient. Les économistes de la Bank of America estiment que les taxes à l'importation pousseront les entreprises à rapatrier leurs activités, mais le 'reshoring' pourrait favoriser les robots plutôt que les ouvriers.
Le président Donald Trump a toujours affirmé que ses droits de douane ramèneraient les emplois industriels. Cependant, le manque de main-d'œuvre qualifiée et les coûts élevés restent des obstacles majeurs. L'automatisation pourrait donc devenir la clé pour relancer la productivité sans embaucher massivement. Un récent rapport de la Bank of America Institute confirme ce ralentissement sectoriel, avec une baisse des commandes de biens durables en avril et un indice PMI en contraction depuis mars.
Taylor Bowley, économiste à la Bank of America, explique à Fortune que ces mesures tarifaires pourraient inverser partiellement le ralentissement, notamment dans certains sous-secteurs. Mais les coûts supplémentaires et les problèmes de main-d'œuvre persistent. Le phénomène de relocalisation s'est accéléré après la guerre commerciale de Trump avec la Chine et la pandémie de COVID-19, révélant les risques des chaînes d'approvisionnement mondiales.
Les lois CHIPS et Inflation Reduction Act de l'ère Biden ont également subventionné les entreprises produisant des semi-conducteurs et des technologies vertes aux États-Unis. Bien que le secteur manufacturier ne représente que 8% de l'emploi total, le reshoring a créé deux millions d'emplois en 15 ans, dont la moitié ces cinq dernières années. Un sondage de la Bank of America auprès de 56 analystes couvrant 1 200 entreprises (capitalisation totale : 38 000 milliards de dollars) montre que 60% s'attendent à un rapatriement modéré des productions si les droits de douane restent élevés.
Cependant, 54% des analystes soulignent que la pénurie de travailleurs qualifiés constitue un frein majeur. Les coûts salariaux élevés, principale raison du départ initial des usines, compliquent le retour. Une enquête du Cato Institute révèle que 80% des Américains croient aux bénéfices nationaux d'une relocalisation, mais seulement 25% envisageraient personnellement de travailler en usine. Face à ces difficultés de recrutement, les entreprises devront améliorer leur productivité sans embaucher, ce qui favorisera l'automatisation.
Les industries high-tech comme l'automobile ou le mobilier haut de gamme sont les meilleures candidates au reshoring, nécessitant une automatisation poussée. En revanche, les productions intensives en main-d'œuvre, comme l'assemblage d'iPhone, ont peu de chances de revenir. Pour les petites entreprises (98% du tissu manufacturier américain), dépendantes de pièces importées, l'incertitude tarifaire complique la planification. Si certaines pourraient gagner en compétitivité locale, d'autres devront réduire leurs stocks, opérations ou effectifs pour absorber les coûts. 'Pour ces petites structures, le reshoring est une épée à double tranchant', résume Bowley. Malgré une croissance des ventes attendue, la pression pourrait se faire sentir au second semestre lorsque les stocks s'épuiseront.