Mille Ans sans Dômes : L'Énigme Architecturale de Rome
Pendant près d'un millénaire, Rome a tourné le dos à une de ses traditions architecturales les plus emblématiques : les dômes. Alors que la ville en comptait des dizaines avant le Ve siècle, leur construction a soudainement cessé pour ne reprendre qu'à la fin du XVe siècle. Cet article explore les raisons de cette éclipse prolongée, à travers les recherches de l'historien de l'art Nicola Camerlenghi.
Avant le Ve siècle, les Romains avaient érigé au moins 58 dômes sur des temples, tombes et thermes publics. Le Panthéon, vieux de 1900 ans, reste le plus célèbre avec sa coupole en béton non armé, toujours la plus grande au monde. Pourtant, après le Ve siècle, plus aucun dôme majeur ne fut construit à Rome pendant 1000 ans, malgré leur popularité croissante dans le reste de l'Italie.
Camerlenghi rejette les explications simplistes comme la 'Chute de Rome' ou les 'Âges Sombres'. Il met plutôt en avant des facteurs locaux : changements dans les pratiques funéraires chrétiennes, nouvelles exigences liturgiques favorisant les basiliques longitudinales, et la perte progressive des savoir-faire techniques. Le dernier dôme du Ve siècle, Santo Stefano Rotondo, utilisait déjà des méthodes radicalement différentes.
Pendant le Moyen Âge, Rome conserva son héritage en réutilisant ses anciens dômes, comme la conversion du Panthéon en église en 609. Mais lorsque Florence, Pise et Venise se lancèrent dans de grands projets de dômes à partir du XIe siècle, les Romains restèrent indifférents, satisfaits de leurs solutions alternatives.
Ce n'est qu'en 1453, avec l'ajout d'un dôme florentin à l'église San Teodoro al Palatino, que Rome renoua avec cette tradition. Sous le pape Sixte IV (1471-1484), la passion pour les dômes refleurit enfin, marquant la fin d'une éclipse architecturale millénaire.