Les tarifs douaniers de rétorsion du Canada contre les États-Unis : une bataille perdue d'avance
Le conflit commercial entre le Canada et les États-Unis cause des dommages économiques considérables aux entreprises et aux consommateurs des deux côtés de la frontière. Des tarifs douaniers sont imposés sur des milliards de dollars de marchandises échangées entre ces partenaires commerciaux inséparables. Si les actions américaines - motivées par la victoire électorale du président Donald Trump et ses promesses de rapatrier la production manufacturière perdue durant des années de "libre-échange" - peuvent se comprendre, la réponse "de rétorsion" du Canada semble plus discutable.
Le Canada justifie ces mesures comme nécessaires pour protéger ses "intérêts, consommateurs, travailleurs et entreprises". Cependant, un examen attentif remet en question la sagesse de cette bataille commerciale. À notre avis, ces tarifs de rétorsion sont malavisés et risquent d'envenimer durablement les relations avec les États-Unis, un conflit que le Canada ne peut gagner. À long terme, cela nuira à l'économie et aux citoyens canadiens.
Preuve de cette incohérence : l'imposition d'un tarif de 25% sur le jus d'orange et le bourbon, produits que le Canada ne fabrique pas. Rendre le jus d'orange américain plus cher ne fait que pénaliser les familles canadiennes qui subissent déjà le taux de chômage le plus élevé depuis huit ans. Elles devront payer plus cher pour mettre du jus d'orange sur leur table, quelle que soit l'option choisie.
Soit les Canadiens paieront le jus américain plus cher, soit ils verront les jus d'autres origines augmenter progressivement - c'est la loi du marché quand l'offre diminue. Quant au bourbon (sans parler des vins de Napa Valley), l'impact sera similaire.
Les États-Unis, puissance économique bien plus importante et principal partenaire commercial du Canada, disposent d'un avantage considérable dans ce conflit. Avec une population dix fois moindre, le Canada ne peut espérer influencer significativement l'économie américaine par ces mesures. Le bourbon du Kentucky et les vins californiens trouveront preneurs ailleurs.
Ces tarifs risquent surtout d'attiser les tensions sans affecter réellement les États-Unis. Le Canada aurait intérêt à préserver ses échanges commerciaux avec son voisin tout en diversifiant ses marchés. Selon la théorie des avantages comparatifs, un libre-échange unilatéral avec les États-Unis et bilatéral avec d'autres partenaires serait plus bénéfique qu'un long conflit commercial coûteux.
Une récente étude de l'Institut économique de Montréal estime qu'une libéralisation unilatérale du commerce pourrait augmenter le PIB canadien de 1,67% et faire baisser les prix de 1,51%. Les industries des ressources naturelles (gaz, pétrole) auraient notamment beaucoup à y gagner. Un contrat d'approvisionnement à long terme avec l'UE ou la Chine aurait plus d'impact que ces tarifs punitifs.
Pour filer la métaphore hockeyistique : celui qui riposte prend généralement la pénalité. La rétorsion canadienne est une erreur stratégique, et ces tarifs de 25% devraient être supprimés avant que le pays n'en subisse les conséquences. Cet article ne reflète pas nécessairement l'opinion de Bloomberg Industry Group, Inc. ou de ses propriétaires.