Comment les SPV Réinventent l'Avenir du Capital-Risque
Le paysage du capital-risque est en pleine mutation. Les anciennes règles du jeu volent en éclats : les délais raccourcis, les sorties prévisibles et les capitaux abondants des investisseurs institutionnels (LP) ne sont plus la norme. Dans ce contexte, un nouvel outil émerge : les véhicules à objet spécial, ou SPV. Autrefois accueillis avec scepticisme, ils deviennent une stratégie centrale pour les gestionnaires de fonds émergents, les opérateurs et les fondateurs.
Selon Shriram Bhashyam, COO de Sydecar, les exigences pour une introduction en bourse (IPO) ont radicalement changé. « Le seuil pour qu'une startup accède à l'IPO s'est élevé. Entre 2010 et 2018, le chiffre d'affaires médian d'une entreprise logicielle soutenue par du capital-risque avant son IPO était de 90 millions de dollars. Depuis 2018, ce chiffre avoisine plutôt 190 millions », explique-t-il. Les délais se sont également allongés, passant de 4 ans lors de la première bulle internet à 10-12 ans aujourd'hui.
Cette évolution crée des tensions en matière de liquidités. Les fondateurs, employés et premiers investisseurs se tournent de plus en plus vers les marchés secondaires privés pour obtenir des liquidités. Cette tendance n'est plus théorique : elle modifie concrètement les comportements au sein de l'écosystème.
Les SPV transforment également la façon dont les gestionnaires de fonds émergents opèrent. Traditionnellement, ils devaient lever un Fonds I, convaincre des LP institutionnels et attendre des années pour des rendements potentiels. Aujourd'hui, face à un environnement de collecte de fonds difficile, les SPV leur permettent d'investir au coup par coup, de démontrer leur jugement et de bâtir des relations avec des LP préférant la flexibilité.
Cette approche s'apparente à ce qu'a fait Vanguard pour les marchés publics : réduire les frictions, les coûts et élargir l'accès. Des plateformes comme Sydecar simplifient la syndication de deals, le suivi des performances et la construction d'une crédibilité sans nécessiter un fonds de plusieurs millions.
La rareté des IPO pousse aussi à revoir les stratégies d'investissement. Les gestionnaires privilégient désormais des tickets plus modestes (souvent inférieurs à 250 000 $) dans des tours pré-seed et seed, avec l'objectif de sortir plus tôt via des transactions secondaires. Ce modèle dynamique s'adapte mieux aux besoins de liquidités des parties prenantes.
Les SPV encouragent aussi une discipline accrue. Les investissements plus modestes obligent à une analyse rigoureuse, favorisant l'efficacité capitalistique. Les fondateurs doivent prouver leur traction avant d'obtenir des montants importants, une évolution saine pour l'écosystème.
Enfin, cette transformation n'est pas un simple effet de mode. Les SPV posent les bases d'une nouvelle approche, où les gestionnaires prouvent leur valeur deal après deal, les fondateurs récompensent leurs premiers soutiens via des secondaires, et les LP investissent progressivement. C'est une révolution silencieuse, mais bien réelle, du capital-risque.