Le franc suisse, une valeur refuge qui devient un casse-tête pour la Suisse
Le franc suisse s'est apprécié de 10% face au dollar américain depuis le début de l'année, créant des défis économiques majeurs pour la Suisse. Cette hausse exerce une pression déflationniste sur l'économie helvétique, qui est retombée en déflation le mois dernier. La Banque nationale suisse (BNS) pourrait être contrainte de recourir à des mesures radicales comme des taux d'intérêt négatifs ou des interventions sur le marché des changes, malgré les risques politiques que cela implique.
La force du franc suisse s'explique par son statut de valeur refuge en période d'incertitude géopolitique et économique. Les investisseurs se ruent vers cette monnaie sûre alors que les politiques commerciales de Donald Trump créent des turbulences sur les marchés financiers mondiaux. Mercredi, le franc a encore gagné 0,2% après la publication de mauvaises statistiques sur l'emploi aux États-Unis.
Cette appréciation a des conséquences directes sur l'économie suisse. Les importations, qui représentent 23% du panier de la consommation, deviennent moins chères, entraînant une baisse générale des prix. En mai, l'indice des prix à la consommation a reculé de 0,1% sur un an, avec une chute de 2,4% pour les produits importés.
Face à cette situation, la BNS pourrait abaisser ses taux directeurs. Charlotte de Montpellier, économiste chez ING, prédit une baisse de 25 points de base ce mois-ci, suivie potentiellement d'un retour aux taux négatifs d'ici fin 2023. La banque centrale avait mis fin à sept années de taux négatifs en 2022, une politique impopulaire auprès des épargnants et des banques.
Une autre option serait d'intervenir sur le marché des changes, comme la BNS l'a fait par le passé. Cependant, cette stratégie est risquée politiquement depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche. En 2020, son administration avait accusé la Suisse de manipulation monétaire et menacé de taxes punitives.
Alex King, ancien trader et fondateur de Generation Money, met en garde contre les conséquences potentielles d'une telle intervention. Selon lui, les représailles commerciales américaines pourraient faire plus de mal à l'économie suisse que les bénéfices à court terme sur l'inflation. La BNS devra donc manœuvrer avec prudence dans les mois à venir pour résoudre ce casse-tête monétaire.