À Marseille, une ombre se transforme en art dans la dernière fresque murale de Banksy
MARSEILLE, France (AP) — Un phare est apparu du jour au lendemain. Peint sur un mur discret d'une rue calme de Marseille, son faisceau s'aligne parfaitement avec l'ombre réelle d'un poteau métallique sur le trottoir. Au centre, en blanc net, on peut lire : « Je veux être ce que tu as vu en moi. » Banksy avait encore frappé.
Vendredi, l'insaisissable artiste de rue britannique a confirmé cette œuvre en publiant deux images sur son compte Instagram officiel, sans légende ni coordonnées. Les fans ont rapidement identifié l'emplacement : 1 rue Félix Frégier, dans le quartier des Catalans du 7e arrondissement de Marseille, près de la mer.
Depuis, les foules se pressent sur les lieux. Les touristes prennent des photos. Les enfants pointent du doigt. Les habitants qui passent habituellement devant s'arrêtent pour regarder de plus près. Il n'y a pas d'explication officielle pour cette phrase, mais sa portée émotionnelle est indéniable : une supplique silencieuse pour la reconnaissance, l'amour ou la rédemption.
Certains spéculent qu'elle fait référence à une ballade country de Lonestar. D'autres y voient une lettre d'amour. Ou une lamentation. Ou les deux. L'image est d'une simplicité trompeuse : un phare solitaire, sombre et usé, projetant un faisceau blanc éclatant. Mais ce qui lui donne sa puissance, c'est la façon dont elle joue avec la lumière — le réel et le peint, le vu et l'imaginaire.
Le maire de Marseille, Benoît Payan, a réagi rapidement en ligne. « Marseille x Banksy », a-t-il écrit, accompagné d'un emoji flamme. En milieu de journée, le hashtag #BanksyMarseille était tendance en France et au-delà. Bien que souvent politique, l'art de Banksy est tout aussi souvent personnel, explorant des thèmes comme la perte, la nostalgie et l'identité.
Ces dernières années, ses œuvres sont apparues sur des bâtiments ravagés par la guerre en Ukraine, en soutien aux migrants traversant la Méditerranée, et sur des murs condamnant le capitalisme, le Brexit et la brutalité policière. L'artiste, qui n'a jamais confirmé son identité complète, a commencé sa carrière en peignant des bâtiments à Bristol, en Angleterre, et est devenu l'un des artistes les plus connus au monde.
Ses images espiègles et souvent satiriques incluent deux policiers masculins s'embrassant, des policiers anti-émeutes armés avec des visages souriants jaunes et un chimpanzé tenant une pancarte avec les mots : « Riez maintenant, mais un jour je serai aux commandes. » Ses œuvres se sont vendues pour des millions de dollars aux enchères, et ses fresques passées ont souvent été volées ou enlevées peu après leur apparition.
En décembre 2023, après que Banksy a peint des drones militaires sur un panneau stop dans le sud de Londres, un homme a été photographié en train de décrocher le panneau avec une pince. La police a arrêté deux hommes pour vol et dommages criminels. En mars 2024, une œuvre sur le thème de l'environnement, peinte sur un mur près d'un arbre dans le nord de Londres, a été vandalisée avec de la peinture, recouverte de plastique et clôturée en quelques jours.
Malgré la célébrité — ou l'infamie — de Banksy, à Marseille, certains passants n'ont même pas remarqué la fresque. Selon la presse locale, certains ignoraient même qui était Banksy. Sur Instagram, des observateurs estiment que cette œuvre marseillaise semble plus discrète. Plus intérieure. Pourtant, elle n'en est pas moins mondiale.
Cette nouvelle création arrive juste avant une grande rétrospective Banksy, qui ouvrira le 14 juin au Musée d'Art de Toulon, présentant 80 œuvres, dont des originaux rares. Une autre exposition ouvre samedi à Montpellier. Mais la fresque marseillaise n'était pas destinée à un musée. Elle vit dans la rue, exposée aux intempéries, aux pas et au temps. Vendredi soir, aucune barrière n'avait été érigée. Aucune vitre protectrice installée. Juste une ombre, un faisceau et un message qui fait déjà le tour du monde.