Loi sur l'IA : Un moratoire controversé pour interdire toute régulation étatique pendant 10 ans
Un projet de loi budgétaire républicain contient une disposition qui pourrait radicalement transformer le paysage de l'intelligence artificielle aux États-Unis. Cette proposition, soutenue par des groupes comme la Chambre de commerce mais vivement critiquée par 77 organisations, imposerait un moratoire de dix ans sur toute régulation étatique de l'IA.
Les opposants affirment que cette mesure, rédigée en termes trop larges, empêcherait les États de protéger les consommateurs contre les applications nocives de l'IA comme les outils de recrutement discriminatoires, les deepfakes ou les chatbots addictifs. En l'absence de législation fédérale sur le sujet - qui n'existe pas actuellement - les citoyens n'auraient d'autre recours que des poursuites judiciaires contre les entreprises.
Les partisans du projet soutiennent qu'il garantirait la domination américaine dans le domaine de l'IA en libérant les entreprises du « patchwork » des régulations étatiques. Pourtant, des États comme le Tennessee (avec sa loi ELVIS contre l'usurpation vocale) ou la Californie (avec des garde-fous pour les chatbots destinés aux adolescents) ont déjà légiféré sur des aspects spécifiques de l'IA.
Camille Carlton du Center for Humane Technology souligne que les régulations proposées par les États ciblent principalement la sécurité (fraude, vie privée) sans entraver l'innovation dans des secteurs clés comme la santé. Elle dénonce une stratégie récurrente des géants technologiques : bloquer les lois étatiques tout en affaiblissant les projets fédéraux.
Gaia Bernstein, experte en politiques technologiques, met en garde contre les conséquences d'un laissez-faire similaire à celui qui a marqué l'essor des réseaux sociaux, au détriment de la santé mentale des jeunes. Avec ce moratoire, prévient-elle, « d'où viendront les protections ? » alors que le Congrès reste paralysé depuis des décennies sur les questions numériques.