Le monde a trop changé pour que Bully 2 ait le même impact
Bully, sorti en 2006, a été un jeu très controversé à sa sortie, souvent à tort. Interdit au Brésil pendant huit ans, blacklisté par deux détaillants britanniques, Rockstar a même été poursuivi par l'activiste anti-jeux vidéo John Thompson, qui qualifiait Bully de "simulateur de Columbine" et "inapproprié pour les enfants". La controverse au Royaume-Uni a été si forte que Rockstar a dû renommer le jeu en 'Canis Canem Edit' pour éviter le mot 'Bully'. En réalité, Bully n'est pas si inapproprié. Les craintes des activistes avant sa sortie, craignant une augmentation du harcèlement scolaire, étaient infondées. Bully est moins un simulateur de harcèlement qu'un simulateur de vie lycéenne. Jimmy se bat souvent, mais la violence est généralement découragée par le design du jeu. L'exploration du monde se concentre sur des farces typiques des enfants turbulents, mais rien de vraiment choquant.
Les détracteurs comparaient Bully à Grand Theft Auto en milieu scolaire, ce qui est inexact. Bien que partageant des mécaniques similaires mais adaptées, Bully est très différent sur le plan tonal et thématique. Comme le souligne Stacey Henley, rédactrice en chef de TheGamer, Bully ressemble plus à Yakuza. Depuis sa sortie, aucun jeu n'a réussi à capturer l'essence de Bully. Et il est peu probable qu'un autre jeu du genre voie le jour, Rockstar préférant désormais se concentrer sur des blockbusters. Pourtant, certains développeurs ont tenté de s'en inspirer, comme en témoigne le récent Agefield High: Rock the School, qui a déçu par son manque de subtilité.
Bully était étonnamment progressiste pour son époque. Le jeu abordait des thèmes comme l'homosexualité, l'ouverture d'esprit et la condition des sans-abri, tout en contextualisant les comportements négatifs comme étant l'œuvre de personnages antagonistes. Gary, le principal antagoniste, incarne la cruauté avec des blagues grossières et des actes répréhensibles, comme porter un uniforme nazi pour Halloween. Cependant, le jeu présente aussi des moments progressistes, comme une relation gay affichée ouvertement. Bully encourageait à défier les normes sociales et à promouvoir l'inclusivité, ce qui le rendrait probablement "woke" aux yeux de certains aujourd'hui.
Aujourd'hui, Bully ne pourrait plus avoir le même impact. Ce qui était autrefois choquant est devenu banal dans certains cercles, notamment sur les réseaux sociaux. L'Overton window a évolué, et les propos tenus par Gary sont désormais monnaie courante dans certains espaces. Les studios évitent de plus en plus les messages politiques, préférant se concentrer sur des éléments comme le combat et l'esthétique. Rockstar, quant à lui, semble encore s'intéresser à la satire, mais dans un monde où la réalité dépasse souvent la fiction, l'exercice devient périlleux. Bully 2, s'il voit le jour, devra trouver un nouvel angle pour marquer les esprits comme l'a fait son prédécesseur.