La Cour suprême et Trump jouent au poker menteur avec Jerome Powell. La Cour suprême va perdre.
Mercredi, Donald Trump a une fois de plus laissé entendre qu'il était sur le point de renvoyer Jerome Powell, président de la Réserve fédérale, en raison du refus de Powell de baisser les taux d'intérêt malgré une inflation persistante. Les marchés ont immédiatement plongé, pour se redresser une fois que le président a reculé, mais seulement après que ses avocats l'aient averti que cette décision serait illégale. L'administration Trump et ses alliés au Congrès continuent de préparer le terrain pour le renvoi éventuel de Powell, croyant pouvoir persuader, tromper ou intimider la Cour suprême pour qu'elle approuve cette action manifestement illégale. Dahlia Lithwick et Mark Joseph Stern ont discuté des dernières menaces de Trump envers le président de la Fed, ainsi que de la réponse probable de la Cour suprême si le président passe à l'acte, dans un épisode bonus de Slate Plus cette semaine. Voici un extrait édité de leur conversation.
Dahlia Lithwick : C'est une histoire politique et économique, mais aussi un jeu de poule géant entre la Cour Roberts et la Maison Blanche. Pour comprendre pourquoi, rappelons-nous : Trump peut-il vraiment licencier le patron de la Fed ?
Mark Joseph Stern : Selon la loi fédérale, Trump ne peut pas renvoyer Powell pour un désaccord politique. La loi autorise le renvoi des membres du conseil de la Fed uniquement pour « motif valable », comme un abus de pouvoir ou une faute professionnelle. Trump ne peut donc pas virer Powell simplement parce qu'il veut baisser les taux et que Powell veut les maintenir. Il y a quatre-vingt-dix ans, dans l'affaire Humphrey’s Executor, la Cour suprême a unanimement confirmé ce type de protection contre le renvoi arbitraire.
Cependant, cette administration rejette la validité de ce précédent et a déjà licencié plusieurs chefs d'agences protégés par la loi. En mai dernier, la Cour suprême a validé, par 6 voix contre 3, le renvoi illégal par Trump de membres démocrates siégeant dans deux agences fédérales importantes. Cette décision semble indiquer que Humphrey’s Executor est mort et que la Cour a adopté la fiction ahistorique d'un « exécutif unitaire » pouvant licencier presque tout fonctionnaire du pouvoir exécutif, sans raison valable.
Pourtant, dans ce même arrêt, la majorité a soudainement déclaré que la Réserve fédérale était différente des autres agences et que ses membres pouvaient toujours être protégés contre un renvoi présidentiel. La justification de la Cour est pour le moins étrange : « La Réserve fédérale est une entité quasi privée, structurellement unique, s'inscrivant dans la tradition historique des Première et Deuxième Banques des États-Unis. » Aucune logique cohérente ne sous-tend cette exception. Les membres de la Fed exercent autant de pouvoir exécutif que les autres agences, et le conseil des gouverneurs n'est pas vraiment « quasi privé ».
Cette exception semble être un appel désespéré des juges conservateurs à Trump : « S'il vous plaît, ne touchez pas à la Fed et ne licenciez pas Powell, nous ne voulons pas que vous détruisiez nos 401(k). » Mais Trump pourrait interpréter cet avis comme une provocation, une occasion de tester jusqu'où il peut pousser la majorité conservatrice. Il pourrait même y voir une chance de prouver que les juges conservateurs reculeront en cas de conflit direct avec son administration. Même s'ils ont fait mine de défendre l'indépendance de la Fed, Trump pourrait bien les défier ouvertement.