Clivage au sein des pro-Trump : Les riches entrepreneurs s'opposent aux puristes du MAGA sur la question des expulsions
Un conflit éclate au sein de la base pro-Trump entre les entrepreneurs fortunés et les puristes du mouvement MAGA concernant la politique d'expulsion des travailleurs immigrés. Ce débat révèle une fracture profonde sur la stratégie économique et migratoire de l'administration Trump.
L'administration Trump est tiraillée entre deux factions. D'un côté, les chefs d'entreprise soutenant Trump, dépendants de la main-d'œuvre immigrée, s'opposent aux puristes du MAGA qui voient dans les expulsions massives un moyen de créer des emplois mieux rémunérés pour les Américains. Cette tension met en lumière les contradictions de la politique migratoire du président.
Les récentes rafles de l'ICE ont semé la panique dans le secteur agricole. Des employés terrifiés ne se présentent plus au travail, laissant les vaches sans traite et les cultures non récoltées. Trump a temporairement suspendu les opérations dans ces secteurs après des plaintes de fermiers et d'hôteliers, avant de promettre une intensification des expulsions.
Dans un post sur Truth Social, Trump a ordonné à l'ICE de réaliser "le plus grand programme d'expulsion massive de l'histoire", ciblant particulièrement les villes démocrates comme Los Angeles, Chicago et New York. Cependant, cette approche radicale rencontre une résistance croissante.
Les dirigeants du secteur hôtelier et agricole ont exprimé leurs craintes de perdre une main-d'œuvre essentielle. Pendant ce temps, la base MAGA considère une application stricte des lois sur l'immigration comme une promesse électorale fondamentale de Trump. Ce conflit se joue en temps réel, avec des conséquences économiques immédiates.
"La peur est le dénominateur commun", explique Emily Knight de la Texas Restaurant Association. La fréquentation des restaurants a chuté depuis l'investiture de Trump, particulièrement dans les zones à forte population mexicaine. Les entreprises constatent déjà l'impact sur leurs revenus.
Ted Pappageorge du syndicat des travailleurs culinaires de Las Vegas met en garde : "C'est une fantaisie ridicule de croire qu'on peut expulser les immigrés qui font fonctionner ce pays sans faire exploser l'économie". Son syndicat représente 60 000 travailleurs issus de 170 pays.
Les changements politiques rapides, comme la révocation du Statut de Protection Temporaire pour les migrants de plusieurs pays, ont transformé du jour au lendemain des travailleurs légaux en sans-papiers. Cela affecte des milliers de travailleurs à Nevada, dont des centaines sur le Strip de Las Vegas.
Les immigrés, souvent sans statut légal, représentent une part vitale de la chaîne alimentaire américaine. Un travailleur sur cinq dans ce secteur est immigré, selon des données officielles. Dans l'industrie laitière, plus de la moitié des 160 000 employés sont nés à l'étranger.
Un raid spectaculaire dans une laiterie du Nouveau-Mexique aurait influencé Trump. Des agents de l'ICE seraient entrés "armés dans les salles de traite, pointant leurs armes sur les vaches", selon le témoignage d'une responsable locale. L'exploitant est passé de 50 à 24 employés du jour au lendemain.
Face à ces conséquences, des républicains modérés ont exprimé leurs préoccupations. Le représentant David Valadao a plaidé pour cibler les criminels plutôt que les travailleurs établis depuis des années. D'autres, comme le président de la commission agricole G.T. Thompson, ont demandé de ne pas perturber la chaîne d'approvisionnement alimentaire.
Andy Harris, républicain du Maryland, a surpris en soutenant l'élargissement des visas de travail légaux. "Avec un taux de chômage à 4%, on ne trouvera pas de travailleurs américains pour ces tâches", a-t-il argumenté. Cette position s'oppose frontalement à celle de Stephen Miller, l'architecte de la politique migratoire de Trump.
Pour une partie importante de la base trumpiste, l'élimination de la main-d'œuvre étrangère est précisément l'objectif. "Notre position est qu'il ne devrait y avoir aucune exception pour qui que ce soit", affirme Ira Mehlman de la FAIR, qui prône des salaires plus élevés pour attirer des travailleurs américains.
Des commentateurs conservateurs comme Charlie Kirk et Matt Walsh ont vivement critiqué toute forme de compromis. Walsh a tweeté : "Les employeurs qui comptent sciemment sur une main-d'œuvre immigrée illégale devraient être en prison".
Le Département de la Sécurité Intérieure maintient que "les opérations sur les lieux de travail restent une pierre angulaire" de leur stratégie. Cependant, atteindre l'objectif de 3 000 arrestations quotidiennes semble impossible sans cibler massivement des travailleurs dont le seul crime est d'être entré illégalement aux États-Unis.
L'impact à long terme de cette politique reste incertain. Une usine de conditionnement de viande du Nebraska ayant perdu 76 employés lors d'un raid a reçu de nombreuses candidatures pour les postes vacants. Mais l'image d'une force militarisée arrêtant des travailleurs modestes pourrait provoquer un contrecoup dans l'opinion publique.
Comme lors du débat sur les visas H-1B, Trump pourrait finalement pencher en faveur des intérêts économiques. Ce nouveau conflit expose les tensions irrésolues entre les promesses électorales et les réalités économiques de l'Amérique trumpiste.