Financement du développement dans un monde post-aide : la solution des plateformes nationales
Alors que l'administration Trump réduit les budgets de l'USAID et que les nations européennes réorientent l'aide au développement vers la défense, le monde entre dans une "ère post-aide". Les plateformes nationales émergent comme une innovation prometteuse pour recadrer le financement du développement en investissement stratégique. Ces mécanismes pilotés par les gouvernements alignent priorités climatiques, besoins d'investissement et agenda de réforme avec les intérêts des partenaires.
Dirigées par les États, ces plateformes servent de hubs stratégiques : elles rassemblent les acteurs, coordonnent les financements et sélectionnent des projets d'investissement. Contrairement à l'approche fragmentée des donateurs, elles permettent aux gouvernements de définir leur propre agenda. Les secteurs prioritaires incluent les énergies renouvelables, l'agriculture climato-intelligente et les infrastructures résilientes.
Cette approche connaît un engouement notable, comme en témoignent les discussions aux réunions de printemps 2025 des banques multilatérales à Washington. Le Groupe d'experts indépendants sur le financement climatique, dont fait partie l'auteur, y voit une innovation capable de mobiliser les capitaux nécessaires pour lutter contre le dérèglement climatique et soutenir le développement économique.
En Afrique, plus de dix pays ont déjà lancé leurs plateformes. L'Afrique du Sud montre à la fois le potentiel et la complexité de ce modèle avec son Partenariat pour une Transition Énergétique Juste. L'Égypte, le Sénégal, le Kenya et le Nigeria suivent cette voie. L'Union Africaine intègre ces plateformes dans sa Stratégie pour le Changement Climatique et le Développement Résilient.
L'initiative Mission 300, menée par la Banque Mondiale et la Banque Africaine de Développement, illustre l'efficacité potentielle de ces plateformes. Son objectif : connecter 300 millions d'Africains à l'électricité propre d'ici 2030. Douze pays ont déjà rejoint ce programme lors du sommet des chefs d'État africains en Tanzanie.
Ces plateformes offrent quatre avantages clés : stabilité politique face aux changements de gouvernement, réduction des risques pour les investisseurs, confiance accrue entre partenaires, et transformation systémique au-delà des projets pilotes. Elles permettent aux gouvernements africains de piloter leur développement économique plutôt que de rester des bénéficiaires passifs de l'aide climatique.
Cependant, leur succès nécessite des données fiables, une collaboration interministérielle et un renforcement des capacités institutionnelles. Avec des besoins estimés à 200 milliards de dollars annuels d'ici 2030 pour atteindre les objectifs climatiques, l'Afrique doit combiner investissements intelligents et gestion prudente de la dette. Les plateformes nationales pourraient être la "boucle" qui relie enfin l'offre et la demande de financement climatique - à condition d'un leadership avisé et d'un engagement soutenu.