Les prix conseillés ne sont-ils plus que des contes de fées ? Le déclin des tarifs fixes dans l'industrie du vélo
Dans les années 80, j'ai commandé un groupe Shimano Deore pour un vélo de randonnée que je construisais. Étant encore à l'école, je payais progressivement avec mon argent de poche chaque samedi. Cette expérience m'a marqué et explique peut-être pourquoi je travaille toujours dans ce secteur 40 ans plus tard. Aujourd'hui, l'industrie du vélo repose sur les promotions, les consommateurs rechignant à payer le prix fort en magasin.
Le marketing saisonnier pousse à renouveler fréquemment son matériel, comme dans la mode. Pourtant, mon vélo de route me satisfait depuis 12 ans. Les grandes marques inventent des changements mineurs pour stimuler les ventes, utilisant les coureurs professionnels comme vitrine.
Les prix conseillés (RRP) ne sont plus que théoriques. Après le boom du vélo post-Covid, les stocks excédentaires ont provoqué une guerre des prix. Des vélos carbone équipés de Shimano Di2 se vendaient avec 40-50% de réduction. Même les marques officielles proposaient ces promotions.
Les magasins indépendants souffrent particulièrement. Contraints de vendre à perte pour écouler des stocks achetés au prix fort, certains reçoivent soudainement des commandes en retard qui encombrent leurs locaux. Les mécaniciens aussi subissent cette dévalorisation, les clients contestant leurs tarifs face aux pièces bon marché en ligne.
À long terme, cette situation menace l'écosystème du cyclisme. Les boutiques physiques sont bien plus que des points de vente : ce sont des lieux de conseil, d'entretien et de communauté. Certaines marques en ligne comme Canyon investissent désormais dans des espaces locaux pour soutenir leurs clients.
Les RRP dans leur forme actuelle semblent condamnés. En tant que consommateur, il faut considérer la valeur à long terme : service, garantie et relation avec son magasin. La vraie bonne affaire n'est peut-être pas dans un carton, mais dans une poignée de main et un sourire familier.
Les marges des magasins sont minces (27-32% au mieux), avec des coûts fixes élevés. Contrairement à d'autres articles de sport, les vélos nécessitent un montage expert. Soutenir sa boutique locale, surtout en période difficile, préserve un maillon essentiel de la culture cycliste.