Pourquoi le marché du travail redoute les sciences humaines
Pourquoi le marché du travail redoute les sciences humaines. Oh, la sociologie… Que comptes-tu faire avec ce diplôme ? Cette question hante chaque étudiant en sciences sociales et humaines. Pourquoi ne pas étudier l'ingénierie ou l'informatique, des domaines très demandés sur le marché du travail ? C'est une question épuisante, posée à chaque réunion familiale, comme si la valeur d'un tel diplôme n'était pas évidente. Sans le savoir, cette question simple est ancrée dans notre culture, influencée par des normes capitalistes et coloniales. Interroger le choix d'études d'une personne révèle des implications troublantes. D'abord, cela suggère que l'éducation ne sert qu'à trouver un emploi. Bien que l'éducation soit cruciale pour l'emploi, cette idée ignore l'enrichissement personnel qu'un diplôme peut apporter. Ensuite, cette obsession pour l'employabilité est façonnée par une vision capitaliste internalisée par ceux qui n'ont pas de formation en sciences humaines. En d'autres termes, celui qui pose la question se préoccupe de la manière dont l'éducation d'autrui peut profiter à l'Amérique capitaliste, où le profit prime sur tout. La valeur individuelle est mesurée à l'aune de l'employabilité et du potentiel de profit, souvent au détriment des travailleurs, des communautés autochtones et de la planète. On pourrait arguer que l'interlocuteur se soucie du bien-être de l'étudiant. Mais s'il en était ainsi, il se satisferait d'apprendre que l'étudiant s'épanouit dans ses études. Le bonheur ne se résume pas à un emploi ou un salaire. On pourrait aussi demander : "Quel est le problème avec le capitalisme ?" La réponse réside dans les origines de cette idéologie. De nombreux chercheurs s'accordent à dire que le capitalisme a été exacerbé et globalisé par le colonialisme, une domination politique visant à exploiter les ressources et à imposer une expansion idéologique, raciale et culturelle. Cela est visible dans les motivations des puissances européennes en Amérique. Par exemple, les colons britanniques recherchaient des matières premières comme le bois, tout en perpétrant un génocide contre les populations autochtones. Il est donc raisonnable d'affirmer que le capitalisme a été introduit lors des entreprises coloniales, où les matières premières jouaient un rôle clé. De plus, l'histoire coloniale fut violente, inhumaine et tragique, et ne devrait pas se répéter. Alors, pourquoi notre société se préoccupe-t-elle autant des structures capitalistes actuelles, aux origines honteuses et aux problèmes persistants ? Pourquoi idolâtrons-nous le bien-être de l'Amérique corporative au point de désapprouver socialement les étudiants en sciences humaines ? Cette norme culturelle explique aussi le sous-financement chronique de ces disciplines. Leur objectif est de questionner, comprendre et critiquer le monde, souvent à travers des perspectives individuelles et diverses. Ainsi, elles remettent en cause des structures sociales comme le capitalisme. Changer le statu quo dérange ceux qui en profitent, d'où le manque de ressources pour ces disciplines. Pour certains, les sciences humaines sont perçues comme une menace à la productivité, comme des mauvaises herbes dans un jardin bien ordonné. L'éducation n'est qu'un exemple : notre monde entier est colonisé. Le colonialisme n'est pas un événement historique clos, mais un phénomène persistant, rebaptisé impérialisme américain ou néolibéralisme. La prochaine fois que vous verrez un t-shirt fabriqué à l'étranger, pensez aux relations globales rendues possibles par l'histoire coloniale. Cette analyse ne vise pas à dissuader d'étudier les STEM ou le commerce. Si quelqu'un est passionné par les sciences ou la météo, qu'il les étudie ! Chacun devrait choisir sa voie. Mais il faut cesser de stigmatiser les sciences humaines. Leur étude est essentielle pour comprendre et améliorer notre société.