Même avec un énorme avantage à domicile, le déclin des Big Three semble inévitable
L'industrie automobile américaine est à nouveau piégée par ses propres erreurs. Depuis des décennies, les constructeurs européens et asiatiques poussent les Big Three (Ford, General Motors et Chrysler) dans une spirale de production de véhicules plus gros, plus rentables mais de moindre qualité. Face aux défis et aux évolutions des consommateurs, ces géants ont systématiquement échoué à s'adapter, préférant maintenir le statu quo et réclamer l'aide gouvernementale sous forme de politiques protectionnistes ou de renflouements massifs. La consécration du Toyota RAV4 comme véhicule le plus vendu en Amérique en 2024, détrônant le pick-up F-series de Ford, marque un tournant symbolique. Autrefois leaders sur la scène internationale, les Big Three peinent désormais à dominer leur propre marché. Le début de ce déclin remonte à la crise pétrolière de 1973, où leur manque de préparation les a laissés à la merci des constructeurs japonais. Malgré les crises financières des années 1990 et 2000, ils ont persisté à commercialiser des véhicules plus grands et plus chers, malgré une qualité et une fiabilité en baisse. Selon Consumer Reports, leurs modèles figurent parmi les plus rappelés du marché, et ne rivalisent pas avec les marques japonaises, coréennes ou allemandes. Les données de ventes et leur résistance à l'électrification ne laissent rien présager de bon. La production automobile américaine s'est effondrée, passant de 500 000 véhicules par mois à peine 100 000 aujourd'hui. Le creux historique de janvier 2009 (107 500 véhicules) a même été dépassé trois fois ces sept derniers mois. Les politiques protectionnistes de l'ère Trump n'ont pas inversé la tendance, et le retard pris dans l'électrification compromet leur compétitivité mondiale. Sans un sursaut rapide, la Chine risque de les marginaliser. À l'image de l'industrie britannique, réduite à quelques marques de luxe sous contrôle étranger, les Big Three pourraient connaître un sort similaire. Seuls Cadillac, Jeep ou Corvette pourraient alors incarner l'héritage automobile américain.